J’ai été interrogé il y quelques jours par mes collègues de BornyBuzz parce que j’étais un acteur de la médiation numérique. Sur la communauté Facebook que j’anime, un futur collègue a demandé quel était le logiciel qu’il devait apprendre à maîtriser. Je lui ai répondu qu’il fallait qu’il cherche le sens de son engagement. La médiation numérique dans mon esprit est un outil qui permet de construire une société plus en adéquation avec nos inspirations profondes. Une fois n’est pas coutume, je vous livre un auto portrait sur le sens que je donne à mon engagement.

Egalité Numérique

Pour moi le problème est relativement simple. On crée un service qui est censé répondre aux besoins des usagers. la première chose qu’on vérifie c’est de savoir si tout le monde a accès à ce service. Le fait de refuser délibérément l’accès à une catégorie de personne est une discrimination. La première cause de discrimination est liée à l’accessibilité du service. Autrement dit, les services excluent de fait 15 à 20 % de la population d’un service parce qu’ils sont en situation de handicap. Est- ce que c’est acceptable ? La question ne se pose pas, la réponse est dans une loi de 2005, c’est illégal. Donc à partir de là demander instamment qu’un service numérique soit accessible à tous devrait être un non-sens.

L’Etat est conscient de ça, au moment où j’écris ces lignes il organise lui même des sessions particulièrement riches sur le sujet. Ce que j’attends c’est qu’il soit exemplaire. Je lui demande de fournir un calendrier de mise en conformité de ses solutions numériques. Si l’Etat n’est pas exemplaire sur cette question alors les collectivités locales auront tous les arguments pour l’imiter.

Inégalité Numérique

Au risque de choquer certains, j’ai grandi et je me suis forgé professionnellement dans les principes de l’éducation populaire. Depuis plus de trente ans je travaille avec des personnes en difficulté sociale. J’en ai moi même fait partie. Je sais ce que c’est que de renoncer à ses droits par ce qu’on ne sait pas comment faire. J’ai pu mesurer personnellement les situations de précarité. Je les ai vécu. Une personne qui n’ a pas de compétence numérique accroît sa précarité.

Là où certains diplômés de Science Po théorisent sur l’inclusion numérique, moi je lui donne corps chaque jour. Très vite on se rend compte que le manque de compétence numérique est un facteur aggravant de situation précaire. Le logiciel de fonctionnement de l’Etat c’est de répondre outillage à la problématique de l’inclusion numérique. Or le premier problème auquel on est confronté c’est le manque de pérennité des postes. Quelles inégalités pouvez-vous diminuer en 18 mois ? Aucune. Pourtant on s’obstine à reproduire ce modèle.

Fraternité numérique

Au final la question numérique est assez accessoire. La question qui m’importe est de savoir comment on souhaite faire société. Mettre un QR Code à l’entrée des musées, c’est dire aux pauvres qui n’ont pas de smartphones que ce lieu n’est pas pour eux. Publier un site qui ne correspond pas aux standards d’accessibilité, c’est dire aux handicapés qu’ils aillent voir ailleurs. Ce n’est pas politiquement correct. je le concède. Pourtant c’est ce que nous faisons chaque jour. Vous trouverez beaucoup de gens pour vous dire que ce n’est pas normal.

Se taire c’est se rendre complice d’un système où il faut huit manipulations informatiques pour prendre rendez-vous pour se faire vacciner contre la Covid_19. Ce système crée de l’exclusion. Ce système aggrave les inégalités. Le numérique en est l’outil. Le numérique peut tout aussi bien être l’outil d’une société plus solidaire, plus inclusive, plus fraternelle. C’est cette vision que je défends ardemment depuis des années.

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