Notre société est fortement impactée par le numérique. Nous nous en rendons compte tous les jours dans notre travail, dans nos transports, nos achats, notre accès à culture, au divertissement, à l’économie et même dans nos relations amoureuses. Ces changements affectent notre relation à la ville ou au territoire qui tend à devenir « intelligent » . Mais comment une ville pourrait être intelligente si elle n’est pas intelligible par tous ? Comment pouvons nous encore faire société si chacun d’entre nous ne peut exercer son rôle de citoyen ? Comment le numérique peut il contribuer à la construction d’un bien commun ?
Citoyenneté numérique
Dans son référentiel pour les enseignants, l’Unesco définissait la citoyenneté numérique ainsi (en 2011) :
« fait de posséder des équipements et des compétences TIC qui permettent de participer à une société numérique, par exemple d’accéder à des informations gouvernementales en ligne, d’utiliser des sites de réseaux sociaux et de faire usage d’un téléphone mobile. »
Le citoyen est celui qui participe de son plein gré à la vie de la cité. Encore faut il qu’il en possède les capacités techniques et cognitives. De la ville à l’État, le numérique est utilisé pour consulter sur des enjeux voire co-construire la société de demain. On estime cependant à 20% la part de la population n’ayant pas accès à Internet. Ces personnes sont elles reconnues comme citoyens à part entière ? Font elles encore partie de notre société ?
Par ailleurs quelle valeur peut encore avoir la notion de citoyenneté quand pour ma part je contribue à une consultation de l’État de Genève par exemple ? Suis-je pour autant un citoyen genevois ? Que dire de mon e-passeport Estonien ?
Société numérique
Une société est un ensemble d’individus qui partagent des normes, des comportements et une culture. Sur internet on peut aisément trouver des normes et des comportements. Parmi les plus courants citons celui de se présenter quand on arrive sur un forum de discussion ou de ne pas écrire en majuscules. Un code de bonne conduite existe sur Internet. Il s’agît de la netiquette. Combien d’internautes en connaissent les contours ? Comment agir contre ceux qui ne respectent pas ces codes ? Quand on est administrateur d’un forum, la réponse simple est celle de l’exclusion. Pour autant, l’individu exclu continue de vagabonder sur la toile et reste un citoyen du cyberespace (en adéquation avec la déclaration d’indépendance du cyberespace).
Le premier acte du web fut un acte de partage. La mise à disposition par Tim Berners Lee du World Wide Web, un outil au service de l’humanité. La société était définie ici dans son entité la plus globale. Pour que le Web soit un outil au service de l’humanité, il nous faut nous tourner inéluctablement vers ceux qui n’y ont pas accès.
Le numérique comme vecteur d’inclusion.
Depuis plus de dix ans mes travaux portent sur les publics les plus éloignés du numérique. J’ai acquis l’intime conviction que si la ville pouvait être intelligente c’était à la seule condition qu’elle soit intelligible. J’entends par là qu’elle puis être comprise par tous., ceux qui y vivent, ceux qui y travaillent et même ceux qui y passent. Pour parvenir à cette fin, il convient de placer l’usager au centre de notre politique. En reconnaissant l’usager comme expert, nous lui redonnons une place de citoyen. Nous lui redonnons le pouvoir d’agir sur sa cité. Si nous tendons vers une ville intelligente, nous devons en aborder les codes. Les codes du numérique sont ceux de la transparence, de l’ouverture, de la confiance et de l’horizontalité. Pour diffuser ces codes nous devons nous appuyer sur des lieux dans lesquels nous faisons société. En un sens nous pouvons faire de nos centres sociaux, de nos espaces culturels,de nos bâtiments publics autant de lieux d’échanges de données. Nous devons rendre ses données ouvertes et accessibles en acculturant les usagers aux outils, aux usages et aux enjeux du numérique. Nous devons accompagner l’ensemble de la population si nous voulons bâtir une société numérique.
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