J’ai assisté ce jeudi 30 avril à une très belle journée d’étude appelée « Animateurs multimédia et bibliothécaires, une coopération en construction ». J’ai mis en ligne un « Storify » de cette journée à partir des tweets de quelques uns des participants.
Retour vers le futur
Le premier Espace Public Numérique a ouvert en 1995. En vingt ans la mission de ces Espaces Publics Numérique a considérablement évolué passant d’une accès à l’outil à un lieu de littératie numérique.Celle-ci consiste en «l’aptitude à comprendre et à utiliser le numérique dans la vie courante, à la maison, au travail et dans la collectivité en vue d’atteindre des buts personnels et d’étendre ses compétences et capacités» (OCDE, 2000). Au fil des années l’animateur multimédia est ainsi devenu médiateur numérique. En 2011 déjà j’écrivais un article sur cette évolution de posture. Quand j’ai crée ce blog, je me suis arrêté sur « médiateur numérique » je m’étais inspiré de la fonction de « médiateur du livre » des bibliothécaires. Par ailleurs, la définition de la médiation numérique donnée par Silvère Mercier fait d’ailleurs référence. D’une part car il s’agît à ma connaissance de la première définition du vocable et d’autre part parce qu’elle est donnée par un bibliothécaire (à relire sur le blog de Silvère Mercier). Cette définition peut complètement s’appliquer au champ des Espaces Publics Numériques. Pour autant en assistant à ces rencontres de Romans j’ai comme eu le sentiment que le rapprochement entre l’animation multimédia (ou médiation numérique) et les bibliothèques peinait à se faire.
Le blues de l’animateur multimédia.
L’animateur multimédia serait isolé, cherchant de la légitimité à sa présence et n’étant pas intégré à la médiathèque. Pourquoi ? Parce qu’il n’est pas bibliothécaire, qu’il ne gère pas de collection, qu’il n’a pas un DUT métier du livre (dans lequel on ne cause que très peu numérique de ce que j’ai compris), parce qu’il n’est pas dans le « moule ». Et pourtant c’est exactement pour cela qu’on l’embauche : pour sa capacité à être disruptif, pour sa capacité à animer des ateliers avec le public, à être innovant et à être transversal. Deux logiques de fonctionnement distinctes, d’une part la logique sillo de la bibliothèque organisée en départements, commissions et collections et celle de l’animateur multimédia qui vient mettre son grain de sable partout car le numérique est omniprésent. Un réflexe peut être trop présent celui consistant à se dédouaner de la « res numerica » de la part des bibliothécaires à l’arrivée d’un animateur multimédia. Quid alors de la continuité du service public ?
Et combien même l’animateur multimédia arriverait en terrain favorable il serait alors limité dans le champ des possibles par l’aspect matériel : réseau trop lent, filtré à outrance, ordinateurs trop vieux, charte d’utilisation inadaptée etc… Pour un peu on peut se demander si la coopération est souhaitable 🙂
Médiateur, Bibliothécaire, même combat
Qu’importe les outils, les freins et les réticences supposées ou réelles gardons à l’esprit que nos missions sont similaires ! » Le bibliothécaire est un intermédiaire actif entre les usagers et les ressources offertes. La formation professionnelle et continue du bibliothécaire est indispensable pour assurer des services adéquats.Des programme d’assistance et de formation des utilisateurs doivent être fournis pour les aider à bénéficier de toutes les ressources. » (Manifeste de l’Unesco sur la bibliothèque publique). « L’animateur multimédia a pour mission de faire découvrir et partager les connaissances et les pratiques numériques pour faciliter l’accès de tous aux services et aux innovations de l’Internet et des Nouvelles Technologies de l’information et de la communication. Il propose et accompagne des projets individuels et collectifs, avec un accueil adapté (enfants, seniors, demandeurs d’emploi, familles, associations, TPE, habitants, …) aux compétences recherchées (maîtrise des outils et de leurs usages citoyens, techniques, sociaux, économiques et culturels…) » (Portail des métiers de l’internet).
Ceci étant dit la coopération est une évidence. L’animateur mutimédia étant en quelque sorte un bibliothécaire spécialisé dans les domaines du numériques, l’idéal à terme étant que cette « spécificité » fasse partie intégrante du cursus du bibliothécaire multimédia.La question n’est donc plus de savoir s’il faut travailler ensemble mais comment le faire.
Merci Loïc pour ce retour très attendu.
Je me souviens très bien du moment où tu avançais le terme de médiateur du numérique (c’était en 2011 ? 4 ans déjà ?). A ce moment là, je refusais de me faire appeler médiateur, le terme m’évoquant une notion de conflit. Je lui préférais « animateur multimédia ». Aujourd’hui, bien que je n’aime toujours pas le terme de médiateur, mon avis a évolué, je dois reconnaitre qu’animateur est trop réducteur.
Il m’arrive donc de me présenter parfois comme médiatrice numérique, parfois pour jauger la réaction de mon interlocuteur, mais le terme sonne encore un peu étrange en feed back…
J’ai noté au passage que « médiateur » suscitait la curiosité, alors qu’animateur plutôt le mépris (Ah bon, tu es TOUJOURS animateur ?). Alors, question d’ego, je vais peut-être l’utiliser un peu plus. Oh, et puis il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis !
Au passage, ton article me fait découvrir un autre joli mot que cette fois, et je le mange toute suite : je suis disruptive. L’animateur multimédia est disruptif… le mot résume assez bien, je trouve, cette impression d’être au cœur d’une (oserait-je le dire ?) révolution.
Ancienne documentaliste et amoureuse de la lecture, je me pose parfois la question d’un « retour » aux métiers du livre, pour échapper aux moments d’overdose numérique, tout en sachant que mon nouveau métier me manquerait tout autant que l’ancien.
J’ai donc plaisir à penser qu’on peut aujourd’hui poser les 2 casquettes sur la même tête.
Merci Christelle.
Et oui, la première fois que j’ai utilisé le terme de médiateur numérique c’était en donnant le nom de domaine de ce blog, en mai 2011. Cela ne nous rajeunit pas. Je crois que oui nous sommes au cœur de cette révolution (osons), dans une position médiane, en ce sens nous sommes bien des médiateurs.