Les semaines d’information sur la santé mentale se déroulent du 18 au 30 mars un peu partout en France. Plus de 1 400 événements partout en France pour parler de la santé mentale avec le grand public. 5000 professionnels et bénévoles mobilisés pour échanger sur le thème de cette 30ième édition : la santé mentale à l’heure du numérique.
Quand on est médiateur numérique, on est très vite confronté à des clichés liés à des pseudos troubles issus d’internet, du numérique, des écrans ou des jeux vidéo. Aussi, on peut parfois se poser une question simple : le web rend il fou ?
Le théorème du marteau
La technologie est neutre par essence. L’outil n’ a aucun effet en soi. Cet effet dépend de l’utilisateur ou de la façon dont il utilise cet objet. Si j’utilise un marteau pour planter des clous, je suis dans une utilisation normale de l’outil. Si j’utilise ce même marteau pour fracasser le crâne de la voisine du premier étage, l’outil n’ a pas changé. Cela ne viendrait même pas à l’idée du législateur de réguler l’usage du marteau. Pourtant c’est exactement ce qu’il fait depuis des années avec Internet.
Les dernières vagues d’attentat ont servi de prétexte à autant de lois visant à réguler l’outil au nom de la lutte contre le terrorisme. Quand les terroristes utilisent des voitures piégées, on ne somme pas Renault de prendre des mesures. Ce jeudi 21 mars, la Députée Laetitia Avia présentera les grandes lignes de sa proposition de loi contre la cyberhaine. La mécanique rebondira sur une affaire d’actualité comme la ligue du LOL. On affirmera haut et fort que c’est insoutenable (ce qui est évidemment le cas). Et comme le vecteur utilisé est Internet, on proposera des « mesures chocs » pour que cela cesse. Imaginez un instant le même raisonnement, il y a 30 ans avec les lettres anonymes découpées dans les journaux…
Il y a de quoi en perdre son latin effectivement. Pas sur que les nouvelles technologies y soient pour quelque chose. La folie collective qui s’empare de nos dirigeants ressemble plus à une folie de fin de civilisation. Internet en est l’amplificateur.
Et les cyberaddictions dans tous ça ?
Résumons. On pourrait être addict à son smartphone, aux jeux vidéos et aux érans. Et bien non ! Pas plus qu’on ne pourrait être addict au Nutella. « Le numérique n’est pas la cause de troubles mentaux spécifiques. Certains ont tenté de mettre en évidence un addiction au numérique, mais sans grand succès. La recherche est grandement invalidée par le fait que les chercheurs utilisent des définitions différentes, des outils d’évaluation différentes, des méthodologie biaisées, par le fait que les plateformes numérique et les pratiques évoluent constamment. » (Yann Leroux )
Pour autant on peut parler de pratiques excessives. Certains diront que c’est jouer avec les mots, sauf que le mot « addiction » n’est pas un mot neutre en médecine. » L’addiction est une affection cérébrale chronique, récidivante, caractérisée par la recherche et l’usage compulsifs de drogue, malgré la connaissance de ses conséquences nocives . Les addictions concernent le tabac (nicotine), l’alcool, le cannabis, les opiacés (héroïne, morphine), la cocaïne, les amphétamines et dérivés de synthèse. Parmi les addictions sans substance, seul le jeu pathologique (jeux de hasard et d’argent) est cliniquement reconnu comme une dépendance comportementale dans les classifications diagnostiques internationales. » (Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives).
Conseil aux parents
Le maître mot c’est l’accompagnement. Accompagnez vos enfants dans leurs pratiques numériques. Si vous ne comprenez pas comment ils peuvent regarder des vidéos de Cyprien ou Enjoy Phoenix pendant deux heures, rappelez-vous qu’ils se demandent surement quel intérêt vous portez à regarder Roland-Garros. Si vous ne comprenez pas le phénomène Fortnite, le mieux est de partager une partie avec votre enfant. Si vous pensez que jouer à Call of Duty peut entraîner des passages à l’acte, rappelez-vous que jouer à Fifa ne fait pas de vous un Messi.
En achetant un BMX à son fils, on intègre qu’il va faire des » bêtises ». On accepte (bon gré, mal gré) qu’il aille au-delà du parking, qu’il parte à l’aventure (et qu’il revienne avec un genou esquinté). Avant qu’il en soit ainsi, on passe de la draisienne…aux stabilisateurs. On lui apprend les rudiments du code de la route. Il en va de même pour son apprentissage des mondes numériques. Profitez de la semaine des médias à l’école (du 18 au 23 mars) pour vous emparer du sujet. C’est un enjeu de citoyenneté majeur pour apprendre le vivre ensemble.
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