Prenez rendez-vous sur le site de la bibliothèque de Douai et on vous rappellera pour vous lire une histoire. Des « lectures-surprises » au téléphone, accessibles à tous.

France Info

Cohésion Sociale

Hélàs ces lectures-surprises ne sont pas accessibles à tous. Car comme le souligne très bien l’article pour pouvoir bénéficier de cette très belle initiative il suffit de s’inscrire sur le site internet de la bibliothèque. Or 20% de la population n’a pas accès à internet. 36 % des familles aux revenus les plus faibles n’ont pas d’ordinateur à la maison. Un tiers des téléphones ne sont pas des smartphones et donc ne sont pas connectés à internet dans ces foyers aux plus faibles revenus (source). Et souvent ces personnes ne fréquentent pas une bibliothèque..

Le rôle du médiateur numérique est de montrer comment le numérique peut être un vecteur de cohésion sociale. Sa posture est de permettre à chaque habitant d’avoir accès aux opportunités offertes par le numérique. Très concrètement, son regard consiste très clairement à interroger cette démarche pour savoir si elle s’adresse effectivement à tous. Malheureusement, ce n’est pas le cas, au contraire. Cette initiative exclue les habitants qui n’ont pas accès à internet et qui pour autant sont ceux qui pourraient avoir le plus besoin de ce très beau service. Car ne nous trompons pas. L’initiative est excellente. Le personnel est formidable. Mais l’absence de politique d’inclusion numérique au sein de la collectivité fait que personne n’intègre cette dynamique dans sa réflexion. Et c’est ainsi qu’on se retrouve à proposer un service qui exclue encore plus ceux qui le sont déjà, alors qu’à la base on voulait faire très exactement le contraire.

Changement de paradigme

A chaque fois que nous mettons en place un service numérique, nous devons nous demander comment ceux qui n’ont pas internet peuvent en bénéficier. Cela va autant pour une inscription à la cantine que pour une lecture surprise. Dans le même le temps à chaque fois que nous mettons en place un service non numérique nous devons nous demander comment le numérique peut augmenter ce service. Il y a trois piliers qui vont nous guider dans cette réflexion : notre posture, le projet de l’établissement et le projet politique de la collectivité. Reprenons l’exemple de ces lectures numériques.

Le Manifeste de l’Unesco sur la bibliothèque publique nous rappelle que les services de la bibliothèque doivent être accessibles à tous. En période de confinement, un service uniquement accessible sur internet ne répond pas à cette exigence. Il faut donc imaginer une autre forme de médiation complémentaire. Par exemple, on pourrait distribuer des bons cadeaux aux élèves des écoles publiques et offrir une lecture surprise au téléphone (sans inscription par internet évidemment). Comment faire face à l’afflux potentiel de visiteurs ?

Le numérique au service du projet

Le personnel a beau être formidable il ne peut pas se démultiplier. Par contre le numérique peut l’aider dans ce sens. Plusieurs solutions sont possibles et je ne vais en citer que deux pour l’exemple. Tout d’abord, il est possible d’enregistrer une lecture et faire jouer cet enregistrement au téléphone. On y arrive très bien pour les musiques d’attente…Bien sur ce n’est pas la même chose qu’une lecture en direct.

Justement il est tout à fait possible de créer un salon d’audioconférence qui soit bien entendu gratuit pour l’appelant. Dans la banlieue parisienne, une animatrice de relais d’assistante maternelle s’est ainsi appuyés sur la solution proposée par OVH pour proposer un conte journalier à chacune des assistantes maternelles. Ces dernières pouvaient alors le faire écouter aux enfants par le biais du haut-parleur. Le numérique doit toujours être au service du projet. Il n’est pas une finalité en soi.

Les dynamiques d’inclusion numérique dans les bibliothèques doivent intégrer cette dimension fondamentale. Ce sont sur ces questions en particulier que je me positionne dans le groupe de travail interministériel sur l’inclusion numérique en bibliothèque. Malheureusement le Ministère de la Culture est peu enclin à concevoir que les bibliothèques doivent être des lieux de culture numérique. La commande du gouvernement est plutôt de faire de l’accès aux droits (sociaux). Le droit à la culture est un droit fondamental. La mission de médiateur numérique est de permettre que chacun ait accès à ce droit. D’autant plus quand ce droit est conditionné à un accès au numérique.

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