Comment le numérique bouscule-t-il les pratiques professionnelles des acteurs ? Qu’est-ce que cela modifie dans les postures d’animation ou de médiation ? Comment cela interroge-t-il les territoires d’intervention et les réseaux d’acteurs ? Quels nouveaux métiers émergent, et pour quel rapport au public ?
Telles sont quelques unes des questions qu’aborde le cahier de l’action n°48 coordonnée par Emmanuel Porte de l’Institut National de la Jeunesse et de l’Éducation Populaire (INJEP). Cet ouvrage ce découpe en trois grandes parties : Questions et Réflexions; Pratiques et Analyses; Pistes. J’ai eu le plaisir d’être un des dix contributeurs de ce cahier de l’action en racontant, analysant et décortiquant mon itinéraire…Une contribution en guise de témoignage pour les prochains médiateurs numériques.
Seul au monde
Souvent, très souvent j’ai eu cette curieuse sensation d’être seul et incompris. La médiation numérique est encore aujourd’hui un concept qui ne s’impose pas naturellement. Il y a sept ans en arrière quand j’ai utilisé ce terme pour mon blog médiateur numérique, j’étais en marge d’une profession composée à 99,99 % d’animateurs multimédia. Aujourd’hui j’ai le sentiment que la profession n’est plus divisée sur la terminologie, reste désormais à l’imposer auprès de nos principaux partenaires que sont les partenaires publics et les usagers. J’observe même qu’il existe des Diplômes Universitaires pour être médiateurs numériques. J’aurais tendance à prolonger le cursus jusqu’au Master au minimum pour les personnes devant mettre en place une stratégie des usages numériques à l’échelle d’un territoire.
Je n’ai guère trouvé plus de soutien auprès de mon cercle professionnel immédiat. Les priorités étaient si nombreuses que le numérique devenait accessoire. Comment intégrer les usages numériques alors que la problématique du public cible tourne autour de lire et écrire ? Comment parler d’inclusion numérique à des élus qui ne se servent jamais d’un ordinateur et qui se font imprimer leur mails par leur secrétaire ? Je ne compte plus le nombre de murs qui se sont dressés, le nombres d’obstacles qu’il a fallu surmonter…
Les crapauds fous
Avec le Web vous n’êtes jamais seul. Cela paraît une évidence aujourd’hui mais cela l’était pas autant aux débuts de Youtube et de Facebook. Quand vous vous posez une question, vous pouvez toujours donner la vôtre. Elle n’est ni bonne, ni mauvaise. Elle est votre. Et si elle est partagée alors c’est qu’elle n’est pas si mauvaise. Dans l’océan du web, j’ai croisé des crapauds fous. Des gens qui ont mis toute leur énergie à faire de l’inclusion numérique, de la littératie pour tous, des biens communs des sujets de société. des sujets, pris et repris jusque dans la dernière campagne des élections présidentielles. Des semeurs de graines, des briseurs de mus, des hackeurs de la société, des visionnaires diront certains, des crapauds fous… »
Le crapaud fou, c’est ce batracien déboussolé qui ne suit pas ses congénères lors de la migration reproductive. Il s’en va se perdre, souvent ne revient jamais à sa mare d’origine, ne trouve pas de conjoint, meurt… Mais quand tous ses congénères, dans leur migration stéréotypée, se heurtent à un obstacle et succombent, la survie de l’espèce ne tient qu’à quelques crapauds fous qui réussissent à trouver de nouveaux chemins vers de nouvelles mares.
Nous avons besoin plus que jamais de crapauds fous. Ils sont désormais si nombreux parmi nous, que finalement nous partageons tous un peu de leur folie. Quand toutes ces folies se connecteront nous entreront dans une nouvelle époque, une nouvelle civilisation »
Le plus improbable peut être est que ces crapauds fous arrivent à se reconnaitre entre eux et faire front commun.
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