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La conduite de séquence de sensibilisation aux usages d’internet est un exercice de style faisant partie du bagage obligatoire du médiateur numérique (ou animateur multimédia, mais remettons ce débat là à plus tard). Bien que passage quasi incontournable de la fonction, le rôle du médiateur numérique est d’y donner un sens.

La peur du méchant loup.

C’est le nom que je donne à la méthode utilisée par mon opérateur. Il n’y a pas si longtemps de cela je reçois un appel du service commercial de mon fournisseur d’accès à internet (FAI).  Après les politesses d’usages celui souhaite m’interroger sur les mesures de sécurité prises sur mon ordinateur (rien que ça).  Mon interlocuteur me demande d’abord si j’ai des enfants qui utilisent l’ordinateur, puis si mon ordinateur est équipé d’un anti-virus, d’un anti-espiogiciel (spyware), d’un anti-rootkit, d’un anti-phishing et d’un logiciel de contrôle parental (et peut-être encore d’autres programmes). Je réponds à ce dernier ce qu’il veut entendre, que j’ai des enfants qui accèdent à mon ordinateur et que je n’ai aucun des logiciels qu’il a mentionné (ce qui en plus est vrai). Mon interlocuteur prend un ton alarmiste et limite me sermonne sur mon rôle de parent qui devrait faire plus attention parce que Internet c’est quand même dangereux. Fort heureusement mon FAI a créé un pack sécurité pour que je puisse utiliser tout cela tranquillement pour la modique somme de 5 € par mois ! Il s’en est fallu de peu pour que je résilie mon abonnement pour éviter l’exposition à un tel risque. Pour la petite histoire, quand le commercial m’a demandé quelle version de Windows j’utilisais et que je lui ai répondu que j’étais sous Linux il a raccroché.

Cette stratégie commerciale est souvent utilisée et demandée. Combien d’interventions ont lieu sur les risques ou les dangers liés à Internet ? Sur la cyberadiction , le happy-slapping , l’accoutumance aux jeux vidéos, le sexting…? La stratégie de la peur n’est efficace que pour éloigner une partie du public d’un danger, hors le propos du médiateur numérique est d’amener le public à internet. Il conviendrait de privilégier la stratégie de la confiance plus que celle de la défiance. De surcroît, en utilisant la stratégie de la peur on donne inconsciemment du crédit à une frange de la population qui pense qu’Internet est source de tous les maux et que c’est la raison pour laquelle il faut en réguler l’accès et les usages.

Bien entendu, éluder la question risque n’est pas le propos. Mais le risque ça se maîtrise et ça se relativise. Si quand vous apprenez à conduire, on ne vous parle que du nombre de morts sur la route ou d’accidentés graves de la circulation, cela ne vous donne pas envie d’aller plus loin; fort heureusement on vous enseigne le code, puis la façon de décrypter la route et même la bonne conduite …

Le risque existe, recevoir un polluriel est un risque. Les conséquences n’ont rien de titanesque, mais il n’empêche que cela devrait être le danger le plus courant auquel sera confronté l’internaute moyen. Ajoutons ensuite, l’acquisition de virus par les supports mobiles et l’usage des jeunes qui demande un traitement à part entière.

Les enfants du Web.

Dans les programmes scolaires, l’usage de l’informatique est devenue une compétence clef. le Brevet Informatique et Internet est obligatoire pour prétendre au Brevet des Collèges. Nos enfants sont confrontés dès le plus jeune âge à un outil qui nous est aussi commun que le stylo, l’ordinateur. Là où cela commence à se compliquer légèrement, c’est que l’encadrement n’est pas toujours à l’aise avec cet outil.  Au delà de cela il y a “l’après” école. Quand un enfant rentre chez lui et indique qu’il faut qu’il apprenne sa leçon de poésie ou fasse des exercices de mathématiques cela parle à tous les parents. Quand demain, il va dire qu’il faut qu’il mette son prof de français en partage sur Google Docs pour relire sa rédaction (déjà vu), pas sur que tous les parents suivent…

C’est à partir de l’âge de 8 ans que l’Internet est introduit dans l’enseignement en pratique. C’est à partir de cet âge là qu’il convient d’éduquer l’enfant aux usages. Dans l’école tout se passe bien, les accès au web et le matériel  sont filtrés et surveillés autant par des machines que par des hommes. Cependant, aucune garantie n’existe pour que ces conditions soient reconduites à domicile. Déjà, il faut partir du principe qu’il y a à domicile l’accès à ces ressources. Pour pallier cette déficience, l’Espace Public Numérique à un rôle majeur à jouer, à lui de se rapprocher de son inspection académique. Pour être certain de trouver un environnement sécurisé au domicile, on pourrait visiter chaque domicile pour vérifier et paramétrer la configuration de chaque ordinateur. Il y a fort à parier que le coût en serait affecté à la famille, ce qui impliquerait une démarche volontaire et, du coup, surement pas majoritaire. Le mieux serait d’accompagner (que je préfère à éduquer) les parents à l’usage de cet outil dans la scolarité de leurs enfants. Fournir aux parents des logiciels ressources (libres) utilisés à l’école (comme la suite G-compris par exemple) et quelques conseils avisés sur la gestion d’Internet. Et surtout,il convient d inscrire cette démarche dans le temps. En intervenant dès 9-10 ans, il n’est peut-être pas très utile d’évoquer les principes fondamentaux liés à la liberté d’expression applicables sur Internet. Il vaut peut-être mieux vanter les mérites de la présence d’un adulte pour aller sur l’ordinateur (de la même manière que pour apprendre sa poésie, ou faire ses exercices de maths) et de l’utilité d’un logiciel de filtrage de contenus. Inscrire sa démarche dans le temps c’est prévoir de revenir plus tard quand l’enfant sera au collège, qu’il sera confronté à d’autres problématiques, y compris au niveau des nouvelles technologies.

Pour conclure.

Parler de sensibilisation aux usages d’internet, c’est parler d’éducation aux médias. Pour pouvoir éduquer, il convient d’apprendre à comprendre. Dans cette tâche, le tort du médiateur numérique serait de partir seul tel Don Quichotte. S’agissant d’enjeux de société, mieux vaut s’assurer d’être bien entouré. De la même manière, il ne faut pas se leurrer, ce n’est pas en menant une séquence sur les “dangers de Facebook” que les choses risquent de changer. Cela se saurait…

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