Lundi 15h, je reçois un mail.Nous vous invitons à participer à une réunion en ligne à propos de Solidarité Numérique à 18h. « Aujourd’hui, l’ensemble des porteurs du projet ne peuvent pas et ne veulent pas poursuivre un tel projet en passant par une mobilisation bénévole. L’Agence Nationale de la Cohésion des Territoires travaille actuellement sur le développement d’un service similaire avec France Services, dans lequel sera inclut un volet de médiation numérique. «
Bref Solidarité Numérique raccroche.
A travers ce billet, je vous propose un retour quelques mois plus tôt dans le feu de l’action.Nous sommes en plein confinement. Ce jour-là sur la plateforme Solidarité-Numérique, un médiateur numérique reçoit un appel bouleversant.
Dernier contact
Éliane appelle parce qu’elle n’a pas vu son père de 91 ans depuis longtemps. Avec le confinement et le coronavirus elle a peur de ne plus jamais le voir .Elle demande comment on pourrait faire pour installer Skype alors qu’il n’a pas touché un ordinateur depuis longtemps . Son père est malentendant et sa surdité fait qu’une démarche d’installation par téléphone ne fonctionnera pas. Il habite à Landerneau dans le Finistère et elle habite à plusieurs centaines de kilomètres. Elle cherche quelqu’un qui pourrait venir lui installer Skype pour communiquer avec elle. Son voisinage immédiat ne comporte aucune personne capable de le faire et son aide à domicile lui dépose les courses devant sa porte et c’est tout. Elle s’en remet à l’équipe de Solidarité Numérique pour trouver une solution.
La communauté
Alors, le médiateur numérique qui traite son appel fait appel à la communauté des médiateurs numériques sur un canal privé.
Un collègue propose la solution Ardoiz de La Poste.Le médiateur numérique appelle La Poste pour voir si en cette période l’offre tiens toujours. Appuyer sur la touche 4 pour une chose, sur la touche 5 pour une autre et ainsi de suite, tape votre code postal … Au bout de dix minutes la voix informe que personne ne décrochera.
Ensuite, un autre propose un numéro pour une assistance par des bénévoles. Le site demande le code postal, mais malheureusement rien dans les environs. La mairie est fermée .
Le médiateur numérique laisse alors un message au Centre Communal d’Action Sociale. Le CCAS le rappelle en lui disant qu’il ne propose que de l’aide alimentaire ou médicale. Finalement c’est le Centre local d’information et coordination gérontologique de Landerneau, qui va débloquer la situation. Il s’occupe de tout et s’ils ont un problème, ils appelleront une fois sur place. Le médiateur numérique rappelle Éliane pour lui annoncer la bonne nouvelle, elle était surprise. Deux jours se sont écoulés. Elle ne pensait pas qu’on puisse la rappeler. Quand le médiateur numérique lui dit qu’en plus il a trouvé une solution elle n’ose y croire. Sa voix se fit plus fébrile et l’émotion était perceptible à distance. Éliane a passé dix minutes à le remercier.
Au-delà des chiffres
La plateforme a traité 20 000 appels environ. 2000 médiateurs numériques se sont portés volontaires pour participer à cette plateforme.Nous avons été environ 700 à participer à cette plateforme. Certains volontaires n’ont pas pu rejoindre les équipes opérationnelles. Tout s’est fait dans l’urgence. Dès son lancement, j’ai alerté sur ce que la plateforme induisait en terme de médiation numérique. Au cours d’une visio-conférence hebdomadaire, le Secrétaire d’état a émis l’hypothèse de la pérennité de ce service. Il n’en est rien, la plateforme est désormais fermée.
Le gouvernement a constaté que plus de 60 % des sollicitations concernaient des démarches administratives
Trois sujets prioritaires sont apparus : communiquer avec ses proches, faire une déclaration en ligne et aussi s’informer et « trouver des informations vérifiées » sur la pandémie… »
« Une question revenait beaucoup : la téléconsultation »,
On ne sait pas trop que penser de ces informations contradictoires concernant la nature des appels. Ils mettent en évidence la nécéssité de publier les statistiques en données ouvertes.
“Les problèmes rencontrés par les usagers sont propres à un territoire, ce ne sont pas les mêmes selon que l’on se trouve dans les Hauts-de France, en montagne, ou en zone rurale”, explique l’ANCT
Nouveau périmètre.
A quel moment a t’on demandé l’avis aux médiateurs numériques sur cette plateforme ? Ce sont eux qui l’ont fait vivre au quotidien. Ce qui a fait la force de cette plateforme c’est qu’un répondant savait qu’il pouvait s’appuyer sur d’autres collègues répartis. C’est exactement le cas pour le médiateur numérique qui a répondu à Éliane. Qu’est-ce qu’on répondra à Éliane la prochaine fois ? Rappelez nous pour un certificat de décès. En effet, le gouvernement a opté pour tester une autre plateforme téléphonique dans six départements. Désormais, les agents des Maisons France Services qui répondront ne géreront que les accompagnements administratifs. Ce n’est pas la vision que je défends de l’inclusion numérique. Le médiateur numérique met l’humain au cœur de son accompagnement.
No responses yet