Ce qui est bien avec l’e-inclusion c’est que beaucoup de gens (au demeurant bien attentionnés) en parlent. Mais dès qu’on creuse un peu sous le vernis, on s’aperçoit que la notion première d’e-inclusion se résume le plus souvent à garantir un accompagnement dans l’accomplissement des formalités administratives en ligne. Il s’avère que l’e-inclusion est une définition un peu plus riche, fort heureusement.
Au Conseil national du numérique…
Nous définissons l’e-inclusion comme «l’inclusion sociale dans une société et une économie où le numérique joue un rôle essentiel»
Le rapport « Citoyens d’un société numérique, accès, littératie, médiations, pouvoir d’agir pour une nouvelle politique d’inclusion » remis par le Conseil National du Numérique en octobre 2013 est très clair. » Nous devons d’abord nous affranchir du concept de fracture numérique.Il pousse à croire que le problème serait résolu dès lorsque des mesures, forcément temporaires,parviendraient à faire«rentrer dans le numérique ceux qui en sont exclus»
Faisant partie de ceux qui ont contribué à la rédaction de ce rapport, je me permets de rappeler quelques évidences. Le rapport repose sur 4 leviers essentiels : accès, littératie, médiations et pouvoir d’agir. Les projets e-inclusion qui mettent en oeuvre ces 4 piliers sont rares. Tous les autres ne sont, au mieux, que des rustines sur une hémorragie ouverte.
Si nous pensons que le numérique n’est pas qu’un enjeu technique et économique mais participe de la construction d’un projet de société,nous devons faire en sorte que chacun dispose des conditions matérielles et culturelles pour en être non pas un simple utilisateur ou consommateur, mais un citoyen à part entière.
En termes clairs cela signifie que les médiateurs numériques n’ont pas pour vocation d’apprendre aux usagers à remplir leurs télédéclarations. Nous n’avons pas pour vocation à faire de chacun un bon administré mais bien de permettre à chacune et à chacun de devenir un citoyen à part entière.
Citoyens d’une société numérique
En sciences humaines, on parle de société quand un groupe d’individus partagent les mêmes mœurs et coutumes. Cela nous amène à nous interroger sur le code source originel du « numérique ». En créant le logiciel WorldWideWeb, Tim Berners-Lee a créé à la fois le premier navigateur web et le premier éditeur web, car il voulait faire du web un média collaboratif, dans lequel tous les acteurs consultent et créent l’information La Déclaration d’indépendance du cyberespace rédigé par John Perry Barlow, un des fondateurs de l’Electronic Frontier Foundation soutient l’idée qu’aucun gouvernement ne peut s’imposer et s’approprier Internet. Nous pourrions citer tout autant Richard Stallman, Aaron Swartz ou de Laurence Lessig.
Et si on se réfère justement au « Code is Law » de Lessig (voir la traduction française) pour agir en tant que citoyens nous devons agir sur le Code. Cela veut dire qu’on doit être capable au minimum de le comprendre. Il ne s’agit pas de lire des lignes de code (ce qui peut venir dans un autre temps) mais bien de comprendre le fonctionnement. Il s’agit de comprendre les tenants et les aboutissants. Ce n’est surement pas en se contentant de remplir des formalités en ligne que nous parviendrons à ce tel résultat.
Renforcer la capacité d’agir
Nous sommes tous à la fois en situation d’inclusion et en situation d’exclusion numérique. le rapport prend plusieurs exemples illustrant ce point de vue. Renforcer notre capacité d’agir ne passe pas nécessairement pas la maitrise du Code. Nous avons dans notre entourage des associations qui font des choses formidables qui ne demandent qu’à être connues. Des individus isolés peuvent marcher sur les mêmes chemins sans jamais se croiser Des femmes au foyer sans emploi qui réalisent, dans nos écoles, des pâtisseries dignes de Top Chef et en même temps elles galèrent à joindre les deux bouts. Le numérique n’est pas une réponse à toutes les situations, mais un outil indispensable à posséder dans sa panoplie. Quand on parle d’e-inclusion, faut-il s’arrêter à garantir l’accès aux droits ou à réduire les inégalités ?
Pour conclure
Pour ma part, je garde comme objectif celui de renforcer la capacité d’agir des citoyens. C’est en ce sens que le rapport e-inclusion se positionne. le voici pour mémoire.
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